Soumission de Houellebecq est probablement l’exemple type de la désinformation pouvant être exercée par les médias. En effet, souvent, la présentation de Soumission de Michel Houellebecq par la presse française, laisse supposer que le livre était un pamphlet islamophobe, voire une analyse politique qui a correctement anticipé le sécecionnisme actuel. Or, la lecture complète du livre fait tomber ces préjugés, pour laisser la place à un ouvrage littéraire évoquant de vrais sujets d’actualité relatifs à la France et à l’Europe.
En effet, Soumission est plus qu'un roman ou un essai mais un concentré de réflexion sur la France du XXIème siècle. Plusieurs idées y sont développées dans un mélange de style à mi-chemin entre la biographie et la fiction. Aussi, le style littéraire amène le lecteur à rentrer dans la peau du héros du livre.
En particulier, l'élection d'un président musulman en France, n’est qu’un alibi ou un prétexte pour attirer le lecteur et développer en filigrane plusieurs idées. Aussi, pour s’exprimer, Houellbecq utilise tantôt la voix du héros de son roman, tantôt la voix du personnage de Rediger, un identitaire converti à l'islam et devenu patron d'une Sorbonne islamisée.
Ainsi, il évoque tout d’abord, longuement, le spleen de l'homme occidental quadragénaire qui rejoint celui du haut cadre non dirigeant. En effet, malgré des moyens matériels aisés, la vie quotidienne est plutôt fade et vide d'un point de vue sentimental et spirituel. Il en est de même pour l'Europe qui serait en déclin progressif, sans valeurs et sans sens.
D’ailleurs, pour lui, le 21ème siècle sera religieux en opposition au 20ème qui était placé sous le signe de l'humanisme. L’humanisme est une version édulcorée de l'athéisme, qui a donné le communisme dans une interprétation extrême, par opposition à la démocratie (version Light).
Aussi, le livre passe en revue avec satire, certains changements intervenus dans la société française comme l’islamisation des beurs, les nouvelles habitudes amenées par les chinois ou l’émergence de sites d'Escort girls remplissant le vide sentimental. Il en est de même pour la valeur argent qui dépasse désormais celle de la culture ou de la méritocratie.
C’est dans ce contexte que Houellbecq aborde l’élection à l’Elysée du président d’un parti islamiste modéré face à Marine Le Pen. Toutefois, en dehors de quelques clichés comme la polygamie ou le mariage avec des mineures voire le financement par le golfe arabe de la culture et de l'enseignement supérieur, cette élection est plutôt décrite sous un regards positif.
Ainsi, l’économie est redressée grâce à la valorisation de la famille (hausse des allocations pour les femmes au foyer), la promotion de l’enseignement privé ou la stimulation de l’auto-entreprenariat et des sociétés familiales. Au passage, il s’agit réellement du programme économique des partis islamistes modérés apparentés aux Frères Musulmans.
De même, un empire européen reprennent l'ancien périmètre romain avec la partie sud de la Méditerranée, parait possible grâce au pouvoir islamiste modéré qui attire des pays maghrébins dans le giron de l’UE.
En parallèle, Houelbecq lance certains débats intéressants comme celui de l’islamisation de l'Occident vu que l'église a abandonné plusieurs combats de valeurs (mariage homosexuel, avortement, place centrale de la famille) et que le mode de vie individualiste est voué à l'échec.
De même, au niveau théologique, l’écrivain évoque le débat entre la religion du père (Islam) et celle du fils (Christianisme). Aussi, les identitaires européens seraient les plus faciles à convertir à l’Islam car en dehors de la haine irrationnelle de cette religion, l'extrême droite a plutôt beaucoup de points communs avec les islamistes.
Enfin, en apothéose, le personnage de Houellbecq finit par se soumettre et se convertir à l'Islam, même si la décision est notamment motivée par des considérations matérielles. La Soumission n’est pas péjorative car pour l’écrivain, l’Islam a tranché la question du Créateur en le rendant parfait et en conseillant la soumission à ses recommandations.